Nouveau vent de panique sur le marché des crypto-actifs. Après la justice Américaine, désormais la plateforme Binance se retrouve dans le viseur de la répression des fraudes et du parquet de Paris. Après avoir communiqué sa volonté de se retirer du marché chypriote, Binance a annoncé très récemment la suspension de ses produits au Pays Bas. Or si lors de l’annonce de la cessation de ses services au Chypre, Binance avait exprimé ses intentions de se concentrer sur les marchés français, Italiens et espagnols, cette nouvelle enquête judicaire pourrait changer la stratégie de la société. Pour rappel, le gendarme de la bourse américaine a déposé 1 chef d’accusation contre la plus grande plateforme de crypto-actifs au monde.
Dans ce cyber espace, ces plateformes qui jouent le rôle d’intermédiaires audacieux orchestrent des rencontres entre les aspirants acheteurs et vendeurs d’actifs numériques, tout comme Amazone le fait pour les produits et l’agent immobilier pour les maisons. Cependant derrière ces transactions, se cachent des enjeux qui dépassent la simple mise en relation. Certains exchanges jouent un double jeu oscillant entre le rôle de broker, agissant pour le compte de leur client et celui de dealer négociant pour leur propre compte. Et c’est précisément ici que les choses deviennent plus compliquées, plus risquées mais aussi bien plus intéressantes.
Pour faire simple, un exchange de crypto-actif de manière générale, n’est plus ni moins qu’un intermédiaire ayant pour objectif de mettre en relation des investisseurs qui souhaitent acheter un actif avec un investisseurs qui souhaitent vendre ce même actif. De manière très schématique, on peut même dire que l’activité d’un exchange est similaire à l’activité d’un centre commercial ou d’une plateforme en ligne comme Amazone qui met en relation des acheteurs et des vendeurs. Concrètement, le principal service fourni par un exchange de crypto monnaie est, en principe le même que n’importe quel courtier en actifs financiers. Néanmoins bien que cela soit souvent oublié par de nombreuses personnes, il existe une différence fondamentale entre ce que l’on appelle un dealer d’un côté et un broker de l’autre. Dans le premier cas, un broker met en relation différents investisseurs souhaitant acheter et vendre un actif et prélève une commission pour les mettre en relation, comme le ferait une agence immobilière. On dit que le broker négocie pour le compte et l’ordre de tiers. C’est à dire ses clients. Dans le second cas et à l’ opposer du broker, le dealer opère sur son propre bilan, cela signifie qu’il exploite son propre actif et détient lui-même les actifs qu’il vend ou achète aux investisseurs. Cela étant dit, on comprend qu’un exchange de crypto-actif joue le rôle de broker ou de dealer en mettant en relation des investisseurs mais avec des cryptographiques et prélève des commissions lors de l’opération. Autrement dit, juridiquement et financièrement parlant, les actifs restent entre les mains des clients et les brokers ne peuvent pas y toucher.
Bien attendu, la conservation de titres ou d’actifs est un service payant et l’exemple le plus courant est sans aucun doute le fameux coffre-fort dans une banque. Une chose est sûre dans le cadre d’une activité de courtage du type broker, en principe l’exchange ne peut pas faire faillite, sauf cas exceptionnel de vol d’actifs. Ce fut par exemple d’une des faillites les plus notoires en 2014 avec le plus grand broker des cryptos au monde, l’exchange japonais MtGox à cause d’un supposé piratage informatique menant au vol des actifs cryptographiques. La plupart du temps, les exchanges fonctionnent comme des dealers et non pas comme des brokers.
EXCHANGES, DEALER ET RISQUES
En réalité de nombreux exchanges de crypto-actifs fonctionnent comme s’ils étaient des dealers et non des brokers. Or, comme expliqué précédemment le dealer opère sur son propre bilan et exploite son propre portefeuille en détenant lui-même les actifs qu’il vend ou achète chez les investisseurs. Une opération d’un exchange qui fonctionne sous la forme d’un dealer serait la suivante : un investisseur crée un compte sur la plateforme et y transfère 100 euros depuis son compte bancaire afin d’acheter du bitcoin. Dans un tel cas de figure, la plateforme est censée utiliser les 100 euros du client et acheter du bitcoin. Si de prime à bord cette opération semble être la même que celle d’un broker, en réalité, elle est totalement différente. L’aspect le plus important à garder en tête c’est que si dans le cas d’un brooker, le bitcoin est belle et bien conservé dans le coffre de la plateforme, avec le dealer, la plateforme ne possède pas nécessairement le bitcoin dans ses coffres. La plateforme ne fait que prendre l’engagement de livrer du bitcoin au moment où le client le lui réclame. Dans le cas où le dealer possède bel et bien le Bitcoin en contrepartie, ou un actif d’une valeur équivalente, on dit que le bilan est équilibré, ce qui implique que le dealer ne court pas de risque. Pour couronner le tout, dans le monde financier de nombreux dealer sont ce qu’on appelle également des teneurs de marché. De façon simple, le teneur de marché est une entité qui a pour vocation de fournir de la liquidité a un actif. Le problème est que souvent les dealers ne parviennent pas à atteindre leur objectif.
Comme on peut le voir aujourd’hui, une grande partie du marché cryptographique est un marché qui imite presque parfaitement les mécanismes de la finance traditionnelle. Bien que l’activité d’un dealer ne soit pas intrinsèquement frauduleuse et joue au contraire un rôle extrêmement important tout comme les banques, les risques de contreparties et de faillite sont potentiellement grands, raison pour laquelle la réglementation prend une importance particulière pour la préservation et la sécurité de l’épargne d’investisseurs plus ou moins averti.
La tourmente qui touche Binance aujourd’hui est à l’origine d’une chute de 10% des parts de marché de la plateforme sur le marché américain. Il semble que l’objectif des régulateurs américains soit désormais d’éradiquer complètement le crypto aux états unis, et quoi de mieux que de commencer par les exchanges avant de s’attaquer aux tokens les plus populaires qui peuvent ensuite être classé comme des titres de valeur mobilières.