Le compromis trouvé par les ministres des finances du G20, le vendredi 13 novembre 2020, doit permettre de faciliter les opérations de restructuration avec pour l’objectif de limiter les défauts de paiement. Cet accord n’est pas que positif.
La bonne nouvelle est que les ministres des finances du G20 se sont accordés sur un nouveau cadre de restructuration de la dette des pays en difficulté mais la mauvaise nouvelle est relative à la crise, à la très faible solidarité internationale et à la pénurie de nouveaux financements en direction des Etats pauvres. Ces derniers vont être nombreux à devoir restructurer leurs dettes au cours des prochains mois.
« L’allégement de la dette se fera dans une plus grande transparence et exigera des efforts au moins comparables des créanciers privés », s’est félicité le ministre français de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, qui a qualifié l’accord d’« historique ». Le Club de Paris avait perdu ces dernières années son rôle central dans la restructuration des dettes souveraines, avec la diminution du poids des créances détenues par ses 22 pays membres.
La Chine et les créanciers privés, qui n’en font pas partie, récoltent désormais près de la moitié du service de la dette des 73 pays les plus pauvres. Les restructurations se négociaient en ordre dispersé, avec la crainte que certains créanciers en profitent plus que d’autres. Désormais, ils devront se coordonner et respecter les principes du « consensus », de la « solidarité », de la « transparence » et de la « comparabilité de traitement ».
Les Etats débiteurs pourront négocier une réduction, une extension, un rééchelonnement, voire une annulation de leurs dettes, tout en se soumettant à un programme macroéconomique défini avec le Fonds monétaire international (FMI), qui jouera un rôle pivot dans la restructuration. « Ce dispositif, qui intègre la Chine dans le multilatéralisme, augmente les chances de succès des restructurations, souligne Thomas Lambert, associé gérant au sein de la banque Lazard Frères. C’est la promesse de restructurations plus rapides, efficaces et ordonnées. »
- HAUSSE DES DEPENSES SOCIALES ET DE SANTE
Selon le décompte du FMI, à la fin de septembre, 35 pays se trouvaient en situation de surendettement ou de risque élevé de surendettement, dont une majorité en Afrique subsaharienne. L’accord de vendredi est « loin d’être suffisant pour faire face à la vague de crises de la dette dans les pays les plus pauvres », juge de son côté Tim Jones, de l’ONG britannique Jubilee Debt Campaign. La crise économique provoquée par la pandémie de Covid-19 fait chuter leurs recettes budgétaires, alors que leurs dépenses sociales et de santé sont en hausse.
L’initiative de suspension du service de la dette mise en place par le G20 en avril 2020 pour les pays les plus démunis n’avait eu qu’une portée très limitée. Les vingt économies les plus riches de la planète avaient tout juste accepté de différer le remboursement de leurs dettes, pour un montant de 5,3 milliards de dollars (4,5 milliards d’euros) pour la seule année 2020, alors que l’ensemble des mesures fiscales de soutien à leurs économies avoisine les 12 000 milliards de dollars. Une goutte d’eau dans un océan de dettes.
La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a également salué l’accord « historique » de vendredi, avant d’ajouter : « Notre soutien doit se prolonger grâce à un allégement de la dette et de nouveaux financements. » De nombreux pays du G20 plaident depuis des mois pour que le FMI émette des droits de tirage spéciaux à hauteur de 500 milliards de dollars, afin de répondre aux besoins de financement des pays pauvres. Toutefois, les Etats-Unis sont opposés à ce mécanisme, qui a pourtant fait ses preuves lors de la crise financière mondiale de 2008-2009. L’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, le 20 janvier 2021, pourrait mettre
fin à ce blocage.